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5 erreurs stratégiques des géants de la bourse

2016-08-17

Stratégie

Pour propulser leur croissance, les entreprises s’investissent dans des exercices de planification stratégique à tous les trois ans. Des exercices qui sont parfois laborieux et énergivores. Comment extraire le meilleur de ces exercices sans tomber dans le piège des erreurs fréquemment commises par les autres? Soyez aux aguets. Nous vous présentons ci-après 5 erreurs communément commises par des entreprises en stratégie.

1- Émuler ses compétiteurs – Selon l’éminent professeur de management de la prestigieuse Harvard Business School, Michael E. Porter, la «grand-mère» de toutes les erreurs stratégiques est de concurrencer ses compétiteurs en faisant un «copier-coller» de leur stratégie, obnubilé par la pensée magique que votre entreprise obtiendra des résultats supérieurs. La course que se livrent actuellement les fabricants de tablettes électroniques (par ex.: Androïd, Windows, Samsung, Apple, etc.) révèle qu’elle est difficile à gagner. Au lieu d’émuler vos rivaux, cherchez à vous différencier par votre unicité. Focalisez sur l’innovation pour créer une valeur supérieure pour vos clients.

La grand-mère de toutes les erreurs stratégiques est de concurrencer ses compétiteurs en faisant un «copier-coller» de leur stratégie obnubilé par la pensée magique que votre entreprise obtiendra des résultats supérieurs.

2- Confondre force et avantage compétitif – Que votre entreprise soit un as dans la confection de pelles mécaniques ou une virtuose de l’expérience client, ce n’est pas parce qu’elle excelle dans un domaine qu’il s’agit d’un avantage compétitif. Une force peut constituer un levier stratégique si elle permet de vous différencier de vos compétiteurs. Rappelez-vous que l’éclopée, la compagnie Eastman Kodak, excellait dans le film à pellicule. Au lieu de poursuivre le combat avec Kodak sur le champ de bataille des vétérans de la guerre du film à pellicule, ses compétiteurs FujiFilm et Sony ont opéré avec succès le virage de la photographie numérique. Même si la photographie n’a jamais été aussi populaire avec les égoportraits et la publication instantanée sur Facebook, Twitter et Instagram, les fabricants de téléphones intelligents font maintenant la jambette aux fabricants de caméras numériques. L’évolution à vitesse grand «V».

Une force peut constituer un levier stratégique si elle permet à l’entreprise de se différencier de ses compétiteurs

3- Se fermer aux idées nouvelles – Au bal des mollusques, Kodak a été couronnée la reine des huîtres. En effet, elle a créé le premier appareil de photographie numérique en 1975. Mais, elle a refusé de le mettre en marché parce qu’il menaçait son modèle d’affaire. Sans le savoir, elle a mis au monde le produit qui allait clouer le cercueil de son film à pellicule et la plonger en phase terminale. Le statu quo est rarement une option stratégique. Combien de fois avons-nous entendu dans le cadre d’exercices de planification stratégique les sempiternelles «phrases-crèvent-ballons» : «On a toujours fait ça de cette façon et ça fonctionne. » ou encore : «On ne change pas une formule gagnante.» On ligote alors le processus avec un faux sentiment de sécurité. Faites place aux idées novatrices au risque de secouer le cocotier de votre histoire, de soulever le velcro des idées préconçues et de redessiner votre modèle d’affaire. Ceci exige la capacité de faire des compromis et implique la possibilité de commettre des erreurs. Les erreurs sont des occasions d’apprentissage. Après les livres, les vêtements, les appareils électroniques, Amazon se lance maintenant dans la livraison de produits alimentaires avec AmazonFresh. Récemment, McDonald, le roi du fast-food, a brassé la cage de son modèle d’affaire en offrant désormais le service aux tables. De plus, il propose à ses clients de personnaliser leur Big Mac en utilisant une borne interactive, avec un choix de plus 30 ingrédients. En outre, il vient d’opérer un virage santé en Asie avec son concept McDonald’s Next qui propose une cuisine à air ouverte ainsi qu’un bar à salade avec un choix de plus de 20 ingrédients.

Avec leur taux d’échecs élevé, les fusions et acquisitions ne constituent certes pas des vitamines de croissance

4- Doper sa croissance à coup de fusions et d’acquisitions – Soumis à la pression constante d’actionnaires myopes, des dirigeants se précipitent sur les fusions et acquisitions pour catapulter leur performance sur d’autres sommets. Néanmoins, ces raccourcis détournent leur attention de l’interne, sur les leviers qu’ils pourraient activer pour optimiser la performance de l’entreprise. Par ailleurs, une vaste proportion des fusions et acquisitions se réalisent à un prix supérieur à la valeur réelle. Pourquoi? L’investisseur a souvent la certitude qu’il sera en mesure d’améliorer significativement la performance de la cible, qu’il fera mieux que l’équipe de direction précédente. Or, la majorité des fusions et acquisitions meurent, enterrées au cimetière des bonnes intentions. En effet, le taux d’échec est estimé entre 70% et 90% [1]. Ces échecs plombent la performance de l’investisseur. La dimension humaine est malheureusement ignorée ou sous-estimée dans le cadre de l’intégration des compagnies.  Cette dimension peut faire torpiller le succès de la transaction. En outre, le choc culturel entre les entreprises est générateur de plusieurs échecs. Les exemples d’échecs sont nombreux: Starbucks et La Boulange: https://www.linkedin.com/pulse/erreur-stratégique-le-cas-de-starbucks-joanne?trk=mp-author-card, Yahoo et ses récentes acquisitions infructueuses de start-ups: https://www.linkedin.com/pulse/erreurs-stratégiques-le-cas-de-yahoo-joanne?trk=mp-author-card etc.[2]

5- Quand le désalignement fait dérailler la stratégie – Les risques de déraillement sont multipliés si la locomotive décisionnelle avance sans que les wagons ne soient attachés. Si les vice-présidences et les directions fonctionnent isolément, sans synergie d’ensemble, il est peu probable que la stratégie livre les résultats escomptés. Par exemple, si vous êtes un assureur de dommages et que vous souhaitez implanter des puces électroniques afin d’améliorer l’évaluation du risque assuré, il faudra minimalement que :

  • Les TI et les approvisionnements puissent comprendre de quels équipements vous aurez besoin ;
  • Les ressources humaines connaissent les talents qui seront requis ;
  • Le marketing contribuent à faciliter l’adhésion des assurés, etc.

En conclusion – La pression des actionnaires et le passé de l’entreprise troublent parfois la vision à long terme des dirigeants. Les dirigeants les trainent parfois comme des boulets au pied duquel ils peuvent difficilement s’affranchir. Avec leur taux d’échecs élevé, les fusions et acquisitions ne constituent certes pas des vitamines de croissance. Elles doivent être analysées avec circonspection. Pour croître dans ce monde sans frontière qui évolue à rythme effréné, les entreprises doivent se propulser dans l’avenir, sans biais, innover au risque de rompre avec leur passé et de commettre des erreurs.

 

[1] The Big Idea: The New M&A Playbook, HBR, 2011
[2]»Top Corporate Mergers: The Good, The Bad & The Ugly, Rasmussen College», 2015