Erreur stratégique : le cas de Starbucks
2016-04-21
Stratégie
Quand les grandes entreprises commettent aussi des erreurs stratégiques* – On croit erronément que les choix stratégiques inopportuns sont l’apanage des petites entreprises. Détrompez-vous. Malgré leurs armées de stratèges, leurs équipes de direction surdiplômées et leurs banques inépuisables de consultants, les grandes entreprises réalisent aussi des erreurs stratégiques. Ces erreurs sont souvent coûteuses et peuvent pousser l’entreprise au bord du précipice. Examinons le cas de Starbucks.
Devant un marché saturé et de ventes qui plafonnent – Les buveurs de café sont abondamment courtisés par une offre spécialisée provenant aussi bien de multinationales (par ex. : Starbucks, Tim Horton, McDonald’s) que de commerçants locaux. Pour accroître ses ventes dans ce marché saturé, Starbucks tente d’inciter ses clients à ajouter une pâtisserie, un croissant ou un sandwich-déjeuner à leur capuccino ou leur latte à l’instar de McDo avec son McMuffin.
Starbucks a développé une stratégie de diversification et d’expansion pour alimenter sa croissance – Pour rehausser son offre alimentaire avec des accords pâtisserie-café, Starbucks a acquis la chaîne La Boulange, au montant de 100 millions de dollars en 2012. La Boulange vendait des pâtisseries et des sandwichs pour le déjeuner dans un réseau de 23 cafés-boulangeries au style français principalement situés dans la région de San Francisco. Starbucks voulait se diversifier tout en offrant à ses clients le savoir-faire artisanal de la boulangerie française. Starbucks caressait l’objectif de créer un réseau national de cafés-boulangeries dans les autres grandes villes des États-Unis et du Canada. Starbucks a nommé le fondateur de La Boulange, Pascal Rigo, responsable du département Food Category.
Mais les clients n’ont pas suivi – Les clients n’ont pas embrassé le changement proposé. Ils se plaignaient que les nouvelles pâtisseries étaient trop chères et raffinées. Ils préféraient l’ancien menu composé de tranches de pain aux bananes et à la citrouille ou les gâteaux au citron. Ils ont porté plainte à l’entreprise et ont massivement exprimé leur mécontentement sur les médias sociaux. L’impact a été négatif sur sa réputation et sur le cours de l’action. Starbucks ne s’est pas demandé quelles seraient les conséquences du changement dans le produit.
Starbucks a donc fait marche arrière – Devant le mécontentement de ses clients et les résultats décevants, Starbucks a été contrainte de réintroduire des aliments de son ancien menu. En outre, moins de 3 ans après l’acquisition, Starbucks a décidé de fermer La Boulange. Selon le président, la chaîne La Boulange était devenue une distraction. Starbucks se concentre dorénavant sur son principal marché : le café. Le fondateur de La Boulange a quitté Starbucks et travaille à la résurrection du concept en ouvrant 6 cafés-boulangeries dans la région de San Francisco nommés : ¨La Boulangerie de San Francisco¨ dans les anciens locaux de La Boulange.
Pendant que ses compétiteurs étaient en croissance – En seulement deux ans, McDonald’s du Canada a doublé ses ventes de café infusé et a développé des cafés de torréfaction supérieure et de nouvelles gammes de saveurs de café. Il a aussi créé un espace dédié au McCafé dans ses restaurants. Tim Hortons a misé sur l’efficacité opérationnelle, la réduction des coûts (de 32 %) et l’ouverture de commerces dans des endroits non-traditionnels.
En conclusion : la pire stratégie constitue l’absence de stratégie – L’erreur est universelle. Elle frappe à la porte des entreprises de toute taille. La stratégie est le phare qui éclaire la route de l’entreprise. Lorsque l’erreur porte sur la stratégie de l’entreprise, l’impact peut être lourd de conséquences. L’exemple de Starbucks nous enseigne l’importance de connecter sur sa base, ses clients, et de se concentrer sur son savoir-faire et sur ce qui nous distingue de nos concurrents. Aussi, on constate qu’il ne faut pas aveuglément focaliser sur nos concurrents et assumer que nos clients veulent ce que nos concurrents offrent. Cependant, comme le souligne l‘éminent professeur Michael Porter, la pire stratégie constitue l’absence de stratégie (Référence : Understanding Michael Porter: The Essential Guide to Competition and Strategy, , HBR, Joan Magretta, 2011).
*Nous tenons à remercier Dario Iezzoni, consultant en éco-rentabilité, https://www.linkedin.com/in/diezzoni/fr anciennement directeur des ventes et du marketing, Café Santropol, pour ses précieux commentaires