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Photo par Suwannar Kawila sur Canva
Gare aux risques de réputation
2017-04-19
Stratégie
Aujourd’hui, les entreprises ne sont plus uniquement évaluées sur la qualité de leurs produits et services, mais aussi sur leur capacité de gestion. Au tribunal de l’opinion publique, les sentences sont lourdes de sanctions pour la réputation d’une entreprise. Le récent exemple de Bombardier est éloquent. Avec les médias sociaux, un client insatisfait peut, en quelques clics de souris, pulvériser la réputation de votre entreprise. Alors, pourquoi tant d’organisations négligent de gérer ce risque?
Il faut 20 ans pour bâtir une réputation et cinq minutes pour la détruire. Si vous y pensez bien, vous ferez les choses différemment. »
– Warren Buffet, homme d’affaires et investisseur américain
Le risque de réputation est le risque qu’une information négative sur votre entreprise, qu’elle soit fondée ou non, ait un impact défavorable sur vos revenus, vos activités ou vos clients, ou engendre d’autres conséquences néfastes comme un litige.
Sa valeur est généralement proportionnelle à la confiance, aux croyances et perceptions que vos clients ainsi que les autres parties prenantes entretiennent à l’égard de votre entreprise. Bien géré, cet actif intangible constitue un avantage compétitif.
« (…) Il existe un fossé entre la vulnérabilité du risque de réputation et les mécanismes mis en place par les entreprises pour répondre à cette vulnérabilité du risque de réputation (…) » – Étude du Cirano, 2012
L’impact d’un risque sur la réputation d’une entreprise peut être dévastateur :
Rappelons-nous quelques-unes des conséquences liées au scandale des accélérateurs qui a terrassé Toyota au début de la décennie :
« Votre marque est ce que les gens disent de vous lorsque vous n’êtes pas dans la pièce… » – Jeff Bezos, fondateur d’Amazon
Comme le souligne à juste titre M. Théberge, vice-président, Affaires publiques et relations avec les médias, Ivanhoé Cambridge, les racines du risque de réputation sont tentaculaires ce qui complexifie sa gestion :
De plus, M. Théberge observe que les éléments déclencheurs sont variés : la fraude d’un dirigeant, un échec commercial, une infraction à une loi ou à un règlement, le traitement inadéquat d’un client ou d’un employé, un litige, un produit défectueux, le rappel d’un produit, une prise de position politique sur les médias sociaux, etc.
La gestion des risques de réputation préoccupe les présidents ainsi que les conseils d’administration. Selon une récente étude de Deloitte, 87 % des dirigeants interrogés estiment que le risque de réputation est « très important » ou « extrêmement important ». Cette considération s’aligne avec l’opinion des consommateurs. En effet, selon une étude réalisée par le Cirano en 2012, les deux tiers des consommateurs canadiens considèrent que la réputation d’une entreprise constitue leur plus important critère d’achat.
« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes. » – Henry Ford, fondateur du constructeur automobile Ford (1863-1947)
Pour les répondants de l’étude mondiale de Deloitte, la responsabilité du risque de réputation relève des plus hauts niveaux de la hiérarchie : le PDG (36 %), le responsable de la gestion des risques (21 %), le conseil d’administration (14 %), ou le directeur financier (11 %).
Dans certaines autres organisations, la gestion du risque de réputation peut être sous la supervision étroite de la direction de la gestion des risques ou de la conformité, des affaires publiques, etc. Certaines organisations mettent en place une structure parallèle pour assurer la gestion du risque de réputation comme la Deutsch Bank : https ://www.db.com/cr/en/concrete-management-of-reputational-risks.htm
Étant donné que l’image d’une entreprise peut être ternie par différentes sources, nous sommes d’avis qu’il s’agit d’une responsabilité corporative où l’ensemble des contributeurs est concerné. Ultimement, comme le précise M. Théberge, le responsable du risque de réputation est le PDG qui doit rendre compte de sa gestion au conseil d’administration. Le conseil d’administration est responsable en dernier ressort de la gestion du risque de réputation. Nous sommes d’avis que le conseil d’administration doit jouer un rôle proactif dans la surveillance de ce risque.
« Ultimement, le responsable du risque de réputation est le PDG qui doit rendre compte de sa gestion au conseil d’administration. » – M. Sylvain Théberge, vice-président, Affaires publiques et relations avec les médias, Ivanhoé Cambridge
Au sein du conseil d’administration, la responsabilité du risque de réputation relève généralement du comité de gestion des risques ou d’audit (par exemple : Radio-Canada). Néanmoins, nous constatons que, trop souvent, le comité d’audit se préoccupe davantage des risques financiers que de la réputation. Certaines entreprises ont mis sur pied un comité de gestion du risque de réputation (par exemple : la Banque Scotia).
Voici les sept meilleures pratiques pour gérer le risque de réputation adéquatement
1- Identifier et analyser les principaux risques de réputation de votre entreprise :
2- Comprendre que la gestion du risque de réputation dépasse les frontières de l’entreprise et englobe les parties prenantes comme les fournisseurs, les partenaires d’affaires, les clients, etc.
3- Assurer un suivi rigoureux des risques de réputation et des mécanismes de contrôle.
4- Rendre au compte au conseil d’administration sur la gestion du risque de réputation. Le conseil d’administration doit mettre en place des mesures pour assurer un suivi étroit de ce risque. Il peut s’agir de confier la responsabilité du suivi de ce risque au comité de gestion des risques.
5- Adopter une politique et des procédures pour mieux prévenir, détecter et surveiller les risques de réputation.
6- Sensibiliser et former les employés au risque de réputation. Les employés doivent être conscients de l’importance de bien protéger la réputation de votre entreprise :
7- Planifier un scénario catastrophe pour se préparer aux risques de réputation.
Pour Sébastien Théberge, les entreprises doivent instaurer une culture de prévention intégrée aux processus décisionnels et opérationnels.
Un proverbe arménien compare la bonne réputation à un collier de perles. Un collier de perles qui tire souvent sa valeur dans l’appréciation d’autrui. Pour préserver sa valeur, il doit être protégé de manière proactive tant par la direction générale que par le conseil d’administration. Les entreprises doivent instaurer une culture de prévention intégrée aux processus décisionnels et opérationnels afin de mieux prévenir, détecter et gérer le risque de réputation.
* Pour la préparation de cet article, nous avons eu le privilège de nous entretenir avec Sébastien Théberge, vice-président, Affaires publiques et relations avec les médias, Ivanhoé Cambridge. Monsieur Théberge est formateur expert en gestion du risque de la réputation au Collège des administrateurs de sociétés. Au cours de sa carrière, il a géré plusieurs crises dont celle très médiatisée entourant l’accident funeste d’un lugeur qui est venu assombrir l’ouverture des Jeux olympiques de Vancouver en 2010. Nous remercions M. Théberge pour sa participation.
Sources :